SAMEDI 22 MAI 2021
15 h 30 (HAE)

Ronan Bretel

Doctorant, École normale supérieure Paris-Saclay

Être ou faire œuvre, réflexion juridique sur la chosification par monstration des corps (en français)

 
Brett Bailey, Exhibit B (2000-2014)
Photo : Sofie Knijff
Peut-on juridiquement devenir une œuvre? La question du devenir renvoie tant à un avenir qu’à un processus. Parler de L’œuvre plutôt que d’une œuvre renvoie à une essence plus qu’à un état. Au travers de trois cas caractéristiques dont a été saisi le droit français (l’exposition Exhibit B (2000-2014), les actions de Tino Seghal et les monstrations décriées Our Body, à corps ouvert (2009)), nous nous proposons de voir comment, à l’entremêlement de l’éthique et du juridique, dans ce passage « de la personne à la chose » (expression de Marie Cornu), le juriste raisonne sur ces corps montrés comme des objets, soit en tant que tels, soit comme substituts d’un absent. Il s’agit ici d’envisager comment l’Être en devenant chose — et donc avoir — vient troubler la summa divisio de tout le droit : la personne contre le bien, déclinaison juridique du dualisme philosophique de l’objet et du sujet. C’est dans cette cristallisation du temps et des lieux de la monstration lue à travers une interprétation téléologique du « sens projeté » sur ces dispositifs expographiques que l’interdit semble disparaître au profit du toléré, ou au contraire que l’ordre public s’oppose à la réification du corps. Être ou faire œuvre, là semble se loger tout l’enjeu juridique de la chosification par monstration des corps que nous nous proposons d’interroger lors de notre intervention.

Ronan Bretel est juriste en droit de l’art, de la culture et du patrimoine. Attaché temporaire d’enseignement et de recherche à l’Université Paris II Panthéon-Assas et doctorant à l’Institut des Sciences sociales du Politique de l’École normale supérieure Paris-Saclay, il prépare une thèse portant le titre L’appréhension juridique du marché de l’art : entre jeu de marché et enjeux patrimoniaux sous la direction de Marie Cornu (directrice de recherche au CNRS). Diplômé de l’Université Paris II Panthéon-Assas en droit du marché et du patrimoine artistiques et ancien étudiant de l’Université Paris-Sud XI en droit d’auteur, il fut chargé d’étude en droit de la circulation des biens culturels pour le CNRS ; il est membre-observateur permanent de la « lutte contre le trafic illicite des biens culturels » à l’UNESCO, et contribue à la veille jurisprudentielle pour le Code du Patrimoine (Dalloz). Il enseigne notamment le droit d’auteur (Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle), le droit des contrats du marché de l’art (Université de Nantes) et le droit du patrimoine culturel (Université Catholique de Lille). Parmi ses dernières contributions : « Une nouvelle figure juridique : les archives privées », « Dation et donation d’œuvres d’art dans la loi du 31 décembre 1968 : charges et réserves d’usufruit » ou « Du sacré en droit du patrimoine culturel ».